
Prévisions et prédictions
Article paru dans Le Spectateur, n° 13, mai 1910.
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RIVISTA DI FILOSOFIA NEO-SCOLASTICA (20 février 1910).
M. C. F. Savio commence une curieuse étude des prévisions et prédictions. Après avoir écarté les faits télépathiques se rapportant à un événement éloigné dans l'espace, mais non pas futur, et les anticipations attribuables à la raison discursive, l'auteur a recours, pour expliquer les cas d'intuition proprement dite de l'avenir, à des données fournies par des manifestations pathologiques très ordinaires ou même par la psychologie normale. Signalons quelques-unes de ces remarques, en nous réservant de revenir sur les conclusions qu'il ne manquera pas de donner plus tard.
« Quand nous est arrivée une triste nouvelle,... abandonnés à la douleur, nous repensons involontairement le fait, le reproduisant dans les circonstances qui nous furent suggérées par le récit même. Dans cet état d'assoupissement de l'activité périphérique, c'est l'imagination qui règne seule : dans la vision imaginative entre bien le fait qui fut objet du récit, mais non plus le récit lui-même ni la personne qui nous apporta la terrible nouvelle. Ainsi les représentations s'accomplissent hors de la série du temps, dissociées des circonstances qui les déterminent hic et nunc; par suite, oubliant le mo- ment où en fait s'est déroulée la vision fantastique, nous avons l'illusion de l'avoir eue bien avant la nouvelle que nous en avons reçue d'une autre personne."
M. Savio attribue la plupart des « avertissements » à des sensations présentes qui échappent à la conscience. Il rappelle le cas de la princesse de Conti avertie par un rêve et courant dans la chambre de ses enfants, dont quelques minutes plus tard la voûte s'effondrait. Il croît que chez la princesse « le sentiment maternel excité par quelque sensation externe s'estréfléchi comme perception distincte d'un péril imminent : le conseil que la raison donnerait en pareille circonstance se presente rapidement comme une décision d'urgence; et le sujet a l'illusion d'avoir eu en rêve un avertissement du danger ». En somme l'auteur regarde comme presque nécessaire à l'existence d'un pressentiment ou d'une prévision « que la cause ou un antécédent du fait ait déjà commencé à exercer quelque influence, ou encore que l'avenir se présente à la raison avec quelque indice de probabilité ». Il présente à ce sujet certaines remarques très simples, mais dont on doit souhaiter qu'elles viennent plus fréquemment à l'esprit au cours de la vie sociale : « c'est ainsi que nous pressentons les torts des personnes qui nous déplaisent; et souvent le tort arrive réellement, provoqué par nous-mêmes, qui, suivant notre antipathie naturelle, n'avons rien fait pour conquérir leur bienveillance ». — Les pressentiments portant sur les maladies ou la mort du sujet lui-même sont dus très probablement à une traduction par la conscience du relâchement des conditions physiologiques : quelque vague que soit cette explication, elle est moins mystérieuse et moins hardie que celle qui aurait recours à une prescience proprement dite.
F. C.
REVUE DES IDÉES (15 mars 1910). - M. G. Dromard étudie les contradicteurs et les entêtés. « ... Ce qui carac- térise l'entêté, c'est qu'en toute circonstance, au lieu d'obéir à une vérité accidentelle de nature objective, il