
Mots d'enfants
paru dans Le Spectateur, tome sixième, n° 54, février 1914.
Les mots qui suivent n'ont pas été prononcés en français. Ils sont traduits de l'allemand, et le pittoresque de expression y perd un peu. Mais cela même permet de se rendre compte que les « mots » d'enfants ne sont pas seulement intéressants comme mots. Certains révèlent des analogies curieuses, refoulées plus ou moins complètement chez l'adulte par le bon sens, sans doute, mais aussi par l'accoutumance et par la timidité vis-à- vis du langage conventionnel.
- Je suis né le 14 février, dit Kurt, justement le jour de mon anniversaire.
- La veilleuse s'est éteinte. Jean se réveille et crie à sa bonne : « Nina, Nina, je ne peux pas ouvrir les yeux ».
- On demande à Paul quel age il a : « Six ans. » - «Tu es encore petit. » — « Je ne suis pas petit, je vais de la tête aux pieds, comme papa. ».
- La petite Dorothée dit : « Je vais dabord chanter pour m'endormir; ensuite je chanterai pour endormir mon petit frère. »
- Charles aime beaucoup les animaux. Il s'amuse unjour, en marchant à quatre pattes. à imiter un cheval : « Maman, dit-il, regarde par derrière, s'il ne me pousse pas déjà une queue. »
- Il pleut à verse. « Maman, demande Lucie, ne pourrions-nous pas boucher le ciel? »
- Ah! maman, donne-moi de l'eau ordinaire, je n'aime pas l'eau de Seltz, elle sent comme quand on a des fourmis dans les pieds.
Extraits du « recueil d'une grand'mère » : Von den Kleinen für die Grossen, Munich, Piper.