
Livres nouveaux
Article paru dans Le Spectateur, n° 15, juillet 1910.
EUGÈNE BERNIER. — Coups d'œil métaphysiques. — Paris, H. Falque. 4 francs.
Voici quelques pensées extraites de ce recueil, qui rappelle souvent Joubert par la pureté de l'inspiration et la grâce du style, quelquefois aussi par la pénétration de l'analyse.
« La perfection de justice réclame la perfection de science. C'est pourquoi, qu'elle le veuille ou non, toute créature est injuste : comme il a été dit, dans un sens identique, que tout homme est menteur » (p. 77).
« La vérité, il est vrai, est intolérante pour tout ce qui n'est pas elle : mais parce que, en vertu de sa nature, elle envisage toutes les faces des choses, elle se trouve être, en définitive, la largeur même d'esprit, et, par suite, l'élément fondamental de la concorde. » (p. 85).
« Vous le croyez incapable : il n'est que distrait! Distrait vingt ans de suite, peut-être; distrait, si vous le voulez, sa vie entière! mais distrait, vous dis-je, et non incapable... » (p. 111).
« Epuiser sur une idée notre puissance d'examen est la vraie méthode pour susciter à côté d'elle dans notre esprit une autre idée ou un groupe naturel d'autres idées » (p. 114).
« S'il est vrai que tout soit dit, comme le croit La Bruyère, il est plus exact encore que rien n'est définitivement dit, car chaque homme est créé précisément pour mettre en lumière, sinon par sa parole, du moins par son existence même, un nouvel et spécial aspect de la vérité » (p. 137).
« La découverte de vingt idées est moins difficile que celle de toute les délicatesses et de toutes les grâces d'une seule » (p. 141).
R.M.G.