Intuition d'un ferblantier
Article paru dans Le Spectateur, n° 50, octobre 1913.
En visitant dernièrement un atelier de ferblanterie pour juger de l'état d'avancement de certaines pièces, un ingénieur s'aperçut que l'ouvrier qui procédait a l'assemblage des différentes parties en vue de les souder, avait considérablement simplifié et amélioré son travail en imaginant un dispositif de montage qui permettait d'obtenir sans tâtonnements des positions respectives correctes de ces parties. L'ingénieur avait souvent réfléchi à ce problème sans résoudre la difficulté : «C'est bien trouvé, dit-il au compagnon, c'est réellement simple et pratique, et c'eût été mon rôle d'y pen- ser d'abord, mais ma foi, vous y êtes parvenu le premier — Je me suis réveillé avec cela, répondit simplement le ferblantier, et j'ai bien vite exécuté mon idée en arrivant à l'atelier. »
Ce fait tout récent doit être rapproché d'une étude antérieure parue sur l'intuition. Il est frappant de voir combien l'exécution manuelle répétée des pièces en question avait posé le problème avec insistance et avec netteté à l'esprit de l'ouvrier; un travail mental intuitif absolument inconscient lui arait d'un coup donné la solution complète, comme par une réaction de l'instinct. Tandis que l'ingénieur qui avait conçu et fait dessiner les pièces et qui savait clairement où était la difficulté, ne l'avait pas vaincue par un travail volontaire.
O. C.